Israël et L'Humanité - Doctrine de la Kabbale sur l'unité d'origine

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IV.

Doctrine de la Kabbale sur l'unité d'origine.

Nous n'ignorons point que la Kabbale n'est pas précisément en faveur auprès d'une certaine école juive; cependant elle nous permet d'envisager cette question de l'unité d'origine sous un aspect nouveau si attrayant et qui justifie si bien les droits du judaïsme au titre de religion universelle, qu'en vérité les adversaires de la théosophie hébraïque se trouveront fort embarrassés pour se priver d'un argument si précieux à cause de la source où nous le pui- sons. Quant à nous, nous obtenons une fois de plus, en le produisant, un double résultat, ou en même temps que nous augmentons le nombre des preuves de l'universalisme israélite, nous démontrons par les faits de quelle force se trouverait privé le judaïsme, s'il renonçait jamais à cette théologie qui forme, croyons-nous, une de ses parties intégrantes.

A l'unité physique de tout le genre humain en Adam, la Kabbale ajoute l'unité de toutes les âmes dans l'âme du premier homme. Entre cette doctrine théosophique qui relie et identifie toutes les âmes à celle d'Adam, et l'enseignement de la Bible qui rattache à Adam toute l'humanité par le seul lien de la descendance, se place une idée intermédiaire appartenant aux Docteurs midrashiques qui servent de trait d'union entre la Bible et la Kabbale. On lit dans Schemot Rabba: « Quand le premier homme était couché encore informe, le Saint, béni soit-Il, lui montra tous les justes qui devaient naître de lui; ceux-ci ci étaient suspendus à la tête d'Adam et ceux-là à ses cheveux; les uns tenaient à son front, les autres à ses yeux, à ses narines, à sa bouche ou à ses oreilles » [1]. Ici, l'idée est mixte, il est bien question comme dans la Genèse du corps d'Adam, mais il ne s'agit plus simplement de la descendance; c'est l'inhérence qui est affirmée ou, comme dans la théosophie, la suprême identité.

Encore que le sujet qui nous occupe ne l'exige pas absolument, [2]nous croyons utile d'essayer de pénétrer le sens rationnel de la théorie kabbalistique et de la traduire, s'il se peut, en langage philosophique. La force vitale ne peut pas procéder de l'organisme; elle a dû au contraire le précéder afin de le créer. Mais l'organisme des parents a dû nécessairement précéder celui des enfants; il est donc à la rigueur possible d'imaginer une transmission régulière de cette force qui de la sorte sera toujours le résultat d'un organisme, le premier excepté, car celui-ci n'ayant reçu la vie d'aucun organisme antérieur, il demeure prouvé que la cause de la vie est indépendante de l'organisme lui-même. Mais quelque idée que l'on se fasse de l'organisme primitif, il n'est pas douteux que le principe de vie de toutes les générations successives ne soit renfermé en lui. On a déjà remarqué que Leibnitz pressentit positivement la nature et l'importance des spermatozoaires, quand il annonça qu'on découvrirait dans les phénomènes de la génération que l'un et l'autre sexe fournit quelque chose d'organisé. Et cette déclaration corrige dans un sens fort juste la théorie de la préformation syngénésique des êtres ou de l'emboîtement des germes, d'après laquelle toutes les semences préexistantes depuis l'origine du monde sont contenues dans celle du premier représentant de chaque espèce. Cette théorie, reconnue fausse par l'ensemble des observations embryogéniques, l'est justement parce que l'élément organise du sexe mâle est indispensable à la formation de l'embryon.

La doctrine d'un Adam androgyne, si en faveur chez les Rabbins, peut nous offrir une solution par la combinaison des deux théories, celle de toutes les âmes comprises en Adam [3] et celle d'un Adam à deux sexes. Ce serait une manière de mettre d'accord la théorie leibnitzienne avec l'état actuel de nos connaissances. Le fait est qu'à l'exception de Claude Bernard, la plupart des savants modernes partagent l'opinion de Leibnitz. Sans parler de Bonnet et de Haller, c'est le système adopté par Cuvier comme la plus satisfaisante de toutes les hypothèses qui se proposent d'expliquer le mystère de la multiplication des êtres vivants. Pflüger a établi la dérivation de l'œuf de l'épithélium ovarien et Balbiani complète l'histoire de l'œuf en faisant provenir cet épithélium d'un élément, le globule polaire, sorti directement de l'œuf; par là il donne un fondement scientifique à la théorie précédente. [4] [5] Cette hypothèse admise, il en résulte cette conséquence qu'Adam a subi une division sexuelle, et ses descendants avec lui, de manière que, comme l'enseignent les Rabbins et les Kabbalistes, chaque âme a été comme Adam bisexuelle et que l'homme ne saurait être parfait, s'il n'est uni à sa véritable moitié.

L'unité d'origine enseignée par la Bible et la théosophie hébraïque nous oblige donc à voir dans l'humanité un seul grand corps et une seule grande âme et l'on comprend aisément de quelle importance est une pareille doctrine pour l'organisation du genre humain.


References

  1. Schemot Rabba 118, 40.
  2. Page 289
  3. כל הנשמות כלולות באדם הראשון
  4. Revue ses Deux Mondes, 17 mars 1871 - Revue scientifique , 2<super> e </super>sem. 1874.
  5. Page 290