Israël et L'Humanité - L'élément surnaturel dans la religion d'Israël

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II.

L'élément surnaturel dans la religion d'Israël.

Nous avons dit que le fonds commun à toutes les religions se retrouve dans la loi d'Israël. Il faut toutefois se garder de croire que ce soit là uniquement le résidu que l'étude analytique des différente cultes nous révèle après l'élimination des caractères spécifiques de chacun d'eux. La critique scientifique confirme de tous côtés ce que nous croyons avoir démontré dans le présent ouvrage et ce que nous pourrions mettre davantage encore en évidence s'il s'agissait d'écrire une philosophie de la religion, à savoir que chaque peuple ou du moins chacune des races humaines a une aptitude particulière pour une certaine branche de la civilisation, qu'elle y peut atteindre un degré de développement tel que les autres nations n'ont plus qu'à chercher à s'en rapprocher et que c'est elle qui reste la mieux douée pour faire fructifier de plus en plus le germe qu'elle a reçu en partage, soit par un mouvement spontané de sa vie intérieure, soit en s'assimilant mieux que toute autre ce qui lui vient du dehors. Voilà ce qu'il ne faut pas perdre de vue quand nous parlons du fonds commun que présente le judaïsme comparé avec les autres religions.

Une race a reçu à l'origine, dans le domaine religieux, une impulsion unique, semblable par exemple à celle qui crée la vie physique d'un individu, et elle perfectionne de plus en plus ce don initial, parallèlement à l'évolution générale de la planète dont l'humanité est l'esprit. Mais comme dans sa marche progressive elle touche les frontières de l'ordre des choses, elle est nécessairement appelée à les dépasser, sa mission étant d'unir la phase actuelle de la nature avec celle qui doit lui succéder et de préparer la transition entre la forme présente de l'univers et son état futur. C'est pourquoi nous devons nous attendre à trouver dans la religion d'Israël, dont le génie religieux fonctionne en vue du perfectionnement de tout le genre humain, non pas seulement ce qui est commun à tous les peuples, mais encore un élément surnaturel on suprarationnel, légitime, indispensable même, pourvu qu'on le comprenne de la manière et dans les limites que nous venons d'indiquer. Cet élément, nous le répétons, est destiné à la constitution de la religion à venir. On voit donc par là, que ce qui rend l'Israélite [1]plus apte que tout autre à représenter le génie religieux de la race et à devenir le prêtre de l'humanité, c'est précisément ce qui lui impose le devoir de se charger, au nom de tous, des obligations relatives au surnaturel; par conséquent celles-ci seront par leur nature même suprarationnelles.

Sans doute, dans toute l'œuvre de la civilisation humaine, il n'y a pas de partie si secondaire qu'on l'imagine, qui ne contribue d'une certaine manière au travail de transformation de l'univers et qui par suite ne doive présenter, dans l'état actuel des choses, un certain côté mystérieux. De fait, les représentants les plus autorisés et les plus éminents de chaque art et de chaque science avouent qu'il y a toujours, en dernière analyse, quelque chose qui leur échappe. C'est que toutes choses, par cela seul qu'elles existent, sont en rapport avec l'infini et qu'ainsi il n'est pas au pouvoir d'une intelligence bornée d'en embrasser toutes les faces. Chaque race exercera donc, dans son domaine particulier, une sorte de prêtrise dont le droit lui est conféré par son aptitude spéciale à voir et sentir, dans cette sphère déterminée, ce que les autres races sont incapables de saisir d'une manière aussi complète et aussi profonde. Mais comme la religion, qui est le domaine propre de l'lsraélite incarne le divin, l'infini, c'est elle aussi qui, mieux que toute autre branche de la culture humaine, est destinée à relier les diverses parties du fini entre elles et les différentes phases de l'évolution universelle; aussi représentera-t-elle tout ce qui surpasse notre entendement, tout ce que nous pouvons qualifier de surnaturel dans l'état présent de nos connaissances. De là le caractère tout spécial du judaïsme qui le différencie des diverses formes religieuses dont est susceptible la loi universelle de l'humanité. Le dualisme se trouve donc ainsi expliqué et justifié sans préjudicier en rien à l'unité fondamentale de la Loi divine.

Ajoutons ici une remarque qui est à nos yeux d'une grande importance. Le rationalisme voudrait que chaque religion distinguât et fit connaître à ses adeptes ce qu'elle contient de propre et de spécial et d'autre part ce qu'elle renferme de commun et d'universel [2]. Or ce qu'aucune révélation ne semblait pouvoir faire, au dire de la critique, sans perdre par cela même toute créance dans les esprits, l'hébraïsme l'a fait précisément par la proclamation de la loi noachide, statut général de l'humanité à côté du mosaïsme, statut personnel des Juifs. [3]


References

  1. Page 616
  2. V. Bersot, Providence, III
  3. Page 617