Difference between revisions of "Israël et L'Humanité - L'idée de religion universelle chez les Romains"

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L'idée de religion universelle chez les Romains.
 
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Israël croit donc que tout le contenu moral de sa propre loi se retrouve, à côté du mosaïsme commence, dans une autre loi qu'il dit destinée au genre humain tout entier. Une institution particulière, aux formes rigoureusement ethniques, se trouve posséder de la sorte non pas seulement la conception théorique, mais les règles mêmes d'organisation de la religion la plus universelle que l'on puisse imaginer; bien plus, elle paraît avoir pour mission spéciale la conservation et la propagation de cette même religion. C'est là un phénomène absolument unique dans l'histoire.
 
 
Israël croit donc que tout le contenu moral (le sa propre loi se retrouve, à côté du commence, dans une autre loi qu'il dit destinée au genre humain tout entier. Une institution particulière, ~ux: formes rigoureusement ethniques, se trouve posséder de la sorte non pas seulement la conception théorique, mais les règles mêmes (forga­nisation de la religion la plus universelle que l'on puisse imaginer; bien plus, elle paraît avoir pour mission spéciale la conservation et la.propagation de cette même religion. C'est là un phénomène absolument unique dans l'histoire.
 
 
 
Locke prétend, il est' vrai, que quelque chose d'approchent aurait existé chez les Romains. A l'entendre, il y aurait eu à Rares une si parfaite harmonie entre les institutions civiles et la religion que la société ne courait pas le risque d'être déchirée par des schismes et qu'elle restait ouverte à tous les cultes. Elle pouvait donc accueillir dans son sein les peuples conquis avec toutes leurs divinités et il aurait suffi punir cela que Numa, reconnaissant la nécessité d'cou religion nationale inséparable do l'Etat, comprît en même temps l'obligation de réduire les dogmes de cette religion d'Rist à un très petit nombre d'articles de foi assez simples pour
 
 
 
 
 
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n'être pas susceptibles de subtiles interprétations ni de fâcheuses divergences et d'un caractère assez général pour qu'ils ne Pussent choquer les croyances d'aucune personne honnête et religieuse. Le credo de cette religion se résumait en ces deux propositions: C'est des dieux que tant bien descend, et pour mériter cos biens, on doit honorer les dieux sortent en se maintenant innocent, bon et justo~
 
 
 
Dans une telle religion, ce qui prédomine, <palais; Locke, c'est la liberté de conscience. En admettant qu'elle fût aussi rêefle qu'il le prétend, il n'est pu douteux que l'idéal romain ne comportait pas autre chose que la coexistence pamfique et toute politique de religions différentes et même hostiles, s'accordent cependant sur certains principes généraux, mais qui au lien de constituer une religion véritable comme la loi noachide, n'était en somme qu'en produit imaginaire de tous les cultes ou, pour mieux dire, une condition d'existence dont aucun d'eu, ne pouvait se Pass«r~ En tout ma nue semblable conception ne s'étendait point au‑delà des frontières et ce n'est nullement des destinées religieuses du genre humain que l'on se préoccupait, mais uniquement de la Paix et de la Prospérité de P Empire.
 
 
 
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Locke prétend, il est vrai, que quelque chose d'approchant aurait existé chez les Romains. A l'entendre, il y aurait eu à Rome une si parfaite harmonie entre les institutions civiles et la religion que la société ne courait pas le risque d'être déchirée par des schismes et qu'elle restait ouverte à tous les cultes. Elle pouvait donc accueillir dans son sein les peuples conquis avec toutes leurs divinités et il aurait suffi pour cela que Numa, reconnaissant la nécessité d'une religion nationale inséparable de l'Etat, comprît en même temps l'obligation de réduire les dogmes de cette religion d'Etat à un très petit nombre d'articles de foi assez simples pour <ref> Page 508 </ref>n'être pas susceptibles de subtiles interprétations ni de fâcheuses divergences et d'un caractère assez général pour qu'ils ne pussent choquer les croyances d'aucune personne honnête et religieuse. Le <i>credo</i> de cette religion se résumait en ces deux propositions: C'est des dieux que tout bien descend, et pour mériter ces biens, on doit honorer les dieux surtout en se maintenant innocent, bon et juste.
  
s'élevèrent d'abord tous les vrais Romains; son aspect essentiel­
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Dans une telle religion, ce qui prédomine, d'après Locke, c'est la liberté de conscience. En admettant qu'elle fût aussi réelle qu'il le prétend, il n'est pas douteux que l'idéal romain ne comportait pas autre chose que la coexistence pacifique et toute politique de religions différentes et même hostiles, s'accordent cependant sur certains principes généraux, mais qui au lieu de constituer une religion véritable comme la loi noachide, n'était en somme qu'un produit imaginaire de tous les cultes ou, pour mieux dire, une condition d'existence dont aucun d'eux ne pouvait se passer. En tout cas une semblable conception ne s'étendait point au delà des frontières et ce n'est nullement des destinées religieuses du genre humain que l'on se préoccupait, mais uniquement de la paix et de la prospérité de l' Empire.
  
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Est-il vrai cependant que la religion romaine se trouvait ouverte à tous les cultes et qu'elle accueillait sans danger pour les croyances nationales tous les dieux des peuples conquis? Il n'y a la qu'une apparence de vérité et seulement pour les derniers temps de l'Empire, alors que dans chaque sujet on voyait un Romain et par conséquent dans chaque culte une des religions nationales. Mais en réalité ce faux simulacre d'universalisme est dû à une toute autre cause qu'au caractère intrinsèque et originel de l'institution romaine. Celle-ci, loin d'être sympathique à ce mélange de cultes, s'y opposait de toutes ses forces, comme le prouvent l'attitude des vrais Romains, leur résistance et leurs protestations contre les premières tentatives de ce genre de la part des Empereurs, surtout de ceux qui étaient d'origine étrangère. Ce n'est que plus tard et à contre cœur que Rome accorda l'hospitalité aux autres religions et ce changement est peut-être dû à l'action du judaïsme lui-même; c'est la propagation de ses doctrines universalistes qui a pu provoquer de la part du paganisme cet effort suprême pour opposer de son côté une religion cosmopolite à celle qui venait de l'Orient. N'a-t-on pas remarqué des tendances analogues dans la philosophie alexandrine désireuse de réhabiliter le paganisme <ref> Page 509 </ref>et n'existe-t-il pas des preuves nombreuses que le christianisme, cette autre forme de l'hébraïsme, a éveillé dans la religion païenne le besoin de contrebalancer son influence par des principes et des exemples de saints personnages capables de lutter avec ceux que les chrétiens proposaient à la foi et à la vénération publiques?
  
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L'institution de Numa est si peu la cause de la tolérance romaine que Locke lui-même reconnaît que l'intention du législateur était de fonder une religion nationale inséparable de l'Etat. Il y a donc là quelque chose de tout à fait différent de la loi noachide qui n'a précisément rien d'ethnique, de judaïque. En quoi pouvait donc consister cette religion universelle que Rome, au dire de Locke, aurait connue? Les grands principes généraux que l'on peut découvrir vers la fin de l'Empire, en admettant qu'ils fussent entrés comme tels dans la conscience romaine, ne formaient pas, nous l'avons dit, un culte distinct, mais simplement un caractère commun à tous les cultes politiquement rapprochés. D'autre part, ce serait un anachronisme que d'attribuer à Numa ce synchrétisme religieux que la nécessité fit établir plus tard, et contre lequel s'élevèrent d'abord tous les vrais Romains; son aspect
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essentiellement cosmopolite répugne à la destination exclusivement nationale qu'eut à l'origine la religion de Numa et les protestations qu'il souleva démontrent bien qu'il n'avait rien de foncièrement romain.
  
souleva démontrent bien qu'il Wavait rien de foncièrement romain.
 
  
 
==References==
 
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Latest revision as of 13:41, 16 July 2010

II.

L'idée de religion universelle chez les Romains.

Israël croit donc que tout le contenu moral de sa propre loi se retrouve, à côté du mosaïsme commence, dans une autre loi qu'il dit destinée au genre humain tout entier. Une institution particulière, aux formes rigoureusement ethniques, se trouve posséder de la sorte non pas seulement la conception théorique, mais les règles mêmes d'organisation de la religion la plus universelle que l'on puisse imaginer; bien plus, elle paraît avoir pour mission spéciale la conservation et la propagation de cette même religion. C'est là un phénomène absolument unique dans l'histoire.

Locke prétend, il est vrai, que quelque chose d'approchant aurait existé chez les Romains. A l'entendre, il y aurait eu à Rome une si parfaite harmonie entre les institutions civiles et la religion que la société ne courait pas le risque d'être déchirée par des schismes et qu'elle restait ouverte à tous les cultes. Elle pouvait donc accueillir dans son sein les peuples conquis avec toutes leurs divinités et il aurait suffi pour cela que Numa, reconnaissant la nécessité d'une religion nationale inséparable de l'Etat, comprît en même temps l'obligation de réduire les dogmes de cette religion d'Etat à un très petit nombre d'articles de foi assez simples pour [1]n'être pas susceptibles de subtiles interprétations ni de fâcheuses divergences et d'un caractère assez général pour qu'ils ne pussent choquer les croyances d'aucune personne honnête et religieuse. Le credo de cette religion se résumait en ces deux propositions: C'est des dieux que tout bien descend, et pour mériter ces biens, on doit honorer les dieux surtout en se maintenant innocent, bon et juste.

Dans une telle religion, ce qui prédomine, d'après Locke, c'est la liberté de conscience. En admettant qu'elle fût aussi réelle qu'il le prétend, il n'est pas douteux que l'idéal romain ne comportait pas autre chose que la coexistence pacifique et toute politique de religions différentes et même hostiles, s'accordent cependant sur certains principes généraux, mais qui au lieu de constituer une religion véritable comme la loi noachide, n'était en somme qu'un produit imaginaire de tous les cultes ou, pour mieux dire, une condition d'existence dont aucun d'eux ne pouvait se passer. En tout cas une semblable conception ne s'étendait point au delà des frontières et ce n'est nullement des destinées religieuses du genre humain que l'on se préoccupait, mais uniquement de la paix et de la prospérité de l' Empire.

Est-il vrai cependant que la religion romaine se trouvait ouverte à tous les cultes et qu'elle accueillait sans danger pour les croyances nationales tous les dieux des peuples conquis? Il n'y a la qu'une apparence de vérité et seulement pour les derniers temps de l'Empire, alors que dans chaque sujet on voyait un Romain et par conséquent dans chaque culte une des religions nationales. Mais en réalité ce faux simulacre d'universalisme est dû à une toute autre cause qu'au caractère intrinsèque et originel de l'institution romaine. Celle-ci, loin d'être sympathique à ce mélange de cultes, s'y opposait de toutes ses forces, comme le prouvent l'attitude des vrais Romains, leur résistance et leurs protestations contre les premières tentatives de ce genre de la part des Empereurs, surtout de ceux qui étaient d'origine étrangère. Ce n'est que plus tard et à contre cœur que Rome accorda l'hospitalité aux autres religions et ce changement est peut-être dû à l'action du judaïsme lui-même; c'est la propagation de ses doctrines universalistes qui a pu provoquer de la part du paganisme cet effort suprême pour opposer de son côté une religion cosmopolite à celle qui venait de l'Orient. N'a-t-on pas remarqué des tendances analogues dans la philosophie alexandrine désireuse de réhabiliter le paganisme [2]et n'existe-t-il pas des preuves nombreuses que le christianisme, cette autre forme de l'hébraïsme, a éveillé dans la religion païenne le besoin de contrebalancer son influence par des principes et des exemples de saints personnages capables de lutter avec ceux que les chrétiens proposaient à la foi et à la vénération publiques?

L'institution de Numa est si peu la cause de la tolérance romaine que Locke lui-même reconnaît que l'intention du législateur était de fonder une religion nationale inséparable de l'Etat. Il y a donc là quelque chose de tout à fait différent de la loi noachide qui n'a précisément rien d'ethnique, de judaïque. En quoi pouvait donc consister cette religion universelle que Rome, au dire de Locke, aurait connue? Les grands principes généraux que l'on peut découvrir vers la fin de l'Empire, en admettant qu'ils fussent entrés comme tels dans la conscience romaine, ne formaient pas, nous l'avons dit, un culte distinct, mais simplement un caractère commun à tous les cultes politiquement rapprochés. D'autre part, ce serait un anachronisme que d'attribuer à Numa ce synchrétisme religieux que la nécessité fit établir plus tard, et contre lequel s'élevèrent d'abord tous les vrais Romains; son aspect essentiellement cosmopolite répugne à la destination exclusivement nationale qu'eut à l'origine la religion de Numa et les protestations qu'il souleva démontrent bien qu'il n'avait rien de foncièrement romain.


References

  1. Page 508
  2. Page 509