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La providenoe universelle.
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La providence universelle.
  
On a dit «Eschyle en montrant la main de Dieu dans les calamités qui frappent les nations a inauguré par cela même la Philosophie de l'histoire. Cet honneur appartient à quelqu'un de Plus ancien quEsclYle, B>il cet vrai que dans la conception hébraïque la providence de Dieu embrasse l'univers entier. c'est ce que Max Xiillu a reconnu à Ba manière lorsque, cherchant une définition générale qui PU s'appliquer à toutes les religions sêmitiquae, il a dit que celles‑ci consistent dm@ le culte de Dieu dans l'histoire, à la différence des religions myennes qui consistent dans le culte (le Dieu dans la nature (1). .
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On a dit qu'Eschyle en montrant la main de Dieu dans les calamités qui frappent les nations a inauguré par cela même la philosophie de l'histoire. Cet honneur appartient à quelqu'un de plus ancien qu'Eschyle, s'il est vrai que dans la conception hébraïque la providence de Dieu embrasse l'univers entier. c'est ce que Max Müller a reconnu à sa manière lorsque, cherchant une définition générale qui pût s'appliquer à toutes les religions sémitiques, il a dit que celles-ci consistent dans le culte de Dieu dans l'histoire, à la différence des religions aryennes qui consistent dans le culte de Dieu dans la nature <ref><i> Leçon d'introduction à la science des religions </i> , p. 81. </ref>
  
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En ce qui concerne le paganisme, cette définition ne paraît guère exacte, car puisque les peuples aryens possédaient des dieux nationaux, on ne peut dire qu'ils ne connaissaient pas au moins une providence divine nationale. D'autre part, on ne saurait soutenir que les Sémites ont ignoré Dieu dans la nature. Ce qui est certain en tout cas c'est que le Dieu d'Israël apparait clairement avec le caractère de providence universelle même avant Moïse. Ne voyons-nous pas le patriarche Abraham s'interposer en faveur des pécheurs de la Pentapole? « Celui qui juge toute la terre n'exercera-t-il pas la justice? » <ref> Genèse, XVIII, 25. </ref>
  
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« L'Eternel se présente pour plaider, dit Isaïe, il est debout pour juger les peuples » <ref> Isaïe, III, 13. </ref>. Le prophète déclare, au verset suivant, que l'Eternel va juger Israël mais n'est-ce pas parce que, comme il vient de le dire, Dieu est le juge de tous les peuples?
  
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Rien ne démontre mieux cette notion de providence générale que l'idée de génies, de protecteurs invisibles que l'hébraïsme reconnaît à chaque nation et qui ne sont nullement des dieux <ref> Page 136 </ref> égaux à celui d'Israël comme on l'a prétendu, mais bien de simples ministres du Dieu unique et suprême et, ésotériquement, les attributs, les aspects particuliers que chaque peuple s'appropriait de l'Etre absolu soit qu'il les personnifiât en autant de divinités distinctes, ce qui était le fond de l'erreur polythéiste, soit qu'il subordonnât sa conception à la croyance à l'unité divine, ce qui constituait alors la vraie religion de la gentilité. L'expression hébraïque de <i>Dieu des dieux </i>, que nous aurons à étudier plus loin, doit être entendue dans ce sens et confirme ce que nous disons de la Providence universelle, car si l'Eternel est le Dieu des dieux, c'est apparemment qu'il leur commande et qu'il en veut être obéi.
  
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Comment s'exerce pour les écrivains sacrés cette providence divine? « L'Eternel régna à jamais, il a dressé son trône pour le jugement. Il juge le monde avec justice, il juge les peuples avec droiture. L'Eternel est un refuge pour l'opprimé, un refuge  au temps de la détresse ». Ceux qui connaissent ton nom se confient en toi, car tu n'abandonnes pas ceux qui te cherchent, ô Eternel ! » <ref> Psaumes, IX, vers. 8 et suiv. </ref> « Les peuples le louent, ô Dieu! tous les peuples te louent. Les nations se réjouissent et sont dans l'allégresse, car tu juges les peuples avec droiture et tu conduis les nations sur la terre. Les peuples te louent, ô Dieu! tous les peuples te louent. La terre donne ses produits; Dieu, notre Dieu, nous bénit. Dieu nous bénit et toutes les extrémités de la terre le craignent » <ref> Ps., LXVII, 4 et suiv. </ref>
  
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Le psaume XXXVI e  nous fait de cette providence une description d'un souffle religieux et poétique admirable: « Eternel! ta bonté atteint jusqu'aux cieux, ta fidélité jusqu'aux nués... Eternel, tu soutiens les hommes et les animaux. Combien est précieuse ta bonté ô Dieu! à l'ombre de tes ailes les fils de l'homme cherchent un refuge. Ils se rassasient de l'abondance de ta maison, et tu les abreuves au torrent de tes délices. Car auprès de toi est la source de la vie » <ref> Ps. XXXVI, 6 et suiv. </ref>. Et le psaume CXLV ajoute avec d'inimitables accents: « L'Eternel soutient tous ceux qui tombent et il redresse tous ceux qui sont courbés. Les yeux de tous espèrent en toi et tu leur donnes la nourriture en son temps; tu ouvres ta main et tu rassasies à souhait tout ce qui a vie. L'Eternel est juste dans toutes ses voies et miséricordieux dans toutes ses œuvres» <ref> Ps., CXLV, 14 et suiv.</ref> <ref> Page 137 </ref> « Déjà dans le Pentateuque, dit un auteur moderne, l'action de Dieu ne se borne pas au peuple élu. C'est lui qui envoie le déluge et disperse les nations après la construction de la tour de Babel; c'est lui qui détruit Sodome et Gomorrhe. Il sauve les Egyptiens dans la disette. Il détruit Ninive et envoie la victoire à Cyrus » <ref> LAURENT, <i> Histoire du droit des gens,</i>, vol. I, p. 404. </ref>. Lorsque Dieu, après le déluge, établit son alliance c'est avec l'humanité entière en la personne de Noé et de sa famille: « Voici, j'établis mon alliance avec vous et avec votre postérité après vous » <ref> Genèse , IX, 9.</ref> Et ce n'est pas tout. On a souvent cité le mot gracieux de S. François d'Assise qui appelait les animaux ses « frères cadets ». Or, ce ne sont pas seulement les hommes, mais les animaux eux-mêmes qui, d'après la Bible, sont compris dans l'alliance divine: « C'est ici le signe de l'alliance que j'établis avec vous et tous les êtres vivants qui sont avec vous... Je me souviendrai de mon alliance entre moi et vous et tous les êtres vivants de toute chair » <ref> Ibid., IX, 11, 15. </ref> Il est donc impossible que la religion hébraïque, qui embrassait dans les vues providentielles les animaux eux-mêmes, en ait exclu les Gentils.
  
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Aussi bien n'avons-nous pas à chercher loin pour trouver une preuve touchante du contraire. Joseph ne craint pas de dire à ses frères, ces bédouins d'il y a trois mille ans, que sa descente en Egypte, a été voulue par Dieu dans un dessein de miséricorde « pour sauver la vie à un peuple nombreux » <ref> Ibid., L, 20. </ref> Ne trouvons-nous pas ici, à côté de la conception de providence universelle, une idée plus noble et plus délicate encore, à savoir que les événements et même les épreuves auxquelles avaient été soumis les patriarches étaient, dans la main de Dieu, des moyens employés pour le bien des Gentils? Et cela était écrit après l'esclavage d'Egypte, au moment où la loi mosaïque imposait aux juifs tant de pratiques destinées à en perpétuer le souvenir! Nous accusera-t-on d'exagération, s'il nous arrive de soutenir dans cet ouvrage que, dans l'esprit du judaïsme, la dispersion d'Israël et ses malheurs séculaires ont été voulus de Dieu pour le salut des nations? Nous en avons ici, tout au début de l'histoire israélite, un témoignage concluant dans ces paroles de Joseph si généreuses et si pleines des sentiments d'universelle charité. <ref> Page 138 </ref> Nous avons vu, dans maints passages des Ecritures, que Dieu est qualifié de juge et que cette justice divine s'étend à tous les peuples. Cela suppose une loi générale obligatoire pour tout le genre humain et une providence qui, sans distinction de races, l'applique en tout lieu et dans tous les temps. Nous allons suivre l'exercice de cette juste providence dans l'histoire biblique et le développement ultérieur de la pensée israélite.
  
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égaux à celui d'Israël comme on Pa prétendu, mais bien de simples ministres du Dieu unique et suprême et, é8ot6riquemant, les attri­buts, les aspects particuliers que chaque peuple s'appropriait de PEtre absolue soit qu'il les personnifiât en autant de divinités distinctes, ce qui était le fond de Perreur polythéiste, soit qWil subordonnât sa, conception à la croyance à PlUnité divine, ce qui constituait alors la vraie religion de la gentilité. Leexpremion hébraïque de Dim du dieux, que nous aurons à étudier plue loin, doit être entendue dam ce sans et oenfirme ce que nous disons de la Providence universelle, car si PEternel est le Dieu des dieuxe, c'est apparemment qulil leur commande et queil en veut être obéi.
 
 
Comment s'exerce pour les écrivains sacrés cette providence divine? « YEternel régna à jamais, il a dressé son trône pour le jugement. Il juge le monde avec justice, il juge les peuples avec droiture. L'Eternet est un refuge pour l'opprimé, un refuge‑ au temps de la détrue». Ceux qui connaissent ton nom se confient en toi, cm tu Wabandonues pu ceux qui te cherchent, ô Etemel 1 » ('). « Les peuples le louent, ô Dieul tous les peuples te louent. Les nations se réjouissent et sont dans PaUêgmae, car tu juges les peuples avec droiturce et tu conduis les nations sur la tom.Les peuples te louent, ô Dieu! tous les peuples te louent. La terre donne affl Produite; Dieu, notre Dieu, tiens bénit. Dieu nous bénit et toutes les extrémités de la terre le craignent > C).
 
 
Le psaume ~‑ nous fait de cette providence une description d'on souffle religieux et poétique admirable: c Eternell ta bonté atteintjusqu'aux cieux, ta fidélité jusqu'aux nues... Eternel, tu son­tiens les hommes et les animaux. Combien est précieuse ta hantée ô Dieu! à Vombre de tes ailes les fils de l'homme cherchent un refuge. lie sce rassasient de Pabondance de ta maison, et tu les abreuves an'turrent de tes délices. Car auprès de toi est la SOUMB de la vie ~ (3). Et le psaume cxLv ajoute avec &inimitables au­cents: « L'Eternel soutient toux ceux qui tombent et il redresse tous ceux qui sont eourbês. Les yeux de tous espérant en toi et tu leur donnes la nourriture en Bon temps; tu ouvres ta main et tu rassasies à souhait tout ce qui a vie. L'Etornel est juste dans toutes ses voies et miséricordieux dans toutes mg oeuvreg > (4).
 
 
 
 
(i) P".", 'x, ,r,. 8 't 't'.
 
 
(1) P,., urvn. 4 t .iY.
 
 
(3) PA., =,v,, 6 't wat'.
 
 
(.) PA., c~', 14 e. .Iy.
 
 
 
DIEU.
 
 
 
 
Déjà dans le Pentaten
 
 
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ive à Cyrus » ('). Lorsque Dieu, aptes le déluge, établit son allisuce4 c'est avec l'humanité entlitre eh la personne de Noé et de sa fa, mîllô~ c Voici, j'établis mon alliance avec vous et avec votre pos. térit6 aprês vous , (2). Et ce n'est pas tout. On a souvent cité le mot gracieux de S. Frangois d'Assise qui appelait les animaux ses « frères cadets ». Or, ce ne sont pas seulement les hommes, mais les animaux eux‑mêmes qui, d'après la Bible, sont compris dans l'alliance divine: c C'cet ici le signe de Vaillance que j~êtabIis avec vous et tous les êtres vivants qui sont avec voua... je me souviendrai de mon alliance entre moi et vous et tous les êtres vivants de toute chair » (3). Il est donc impossible que la religion hébraïque, qui embrassait (laits les vues providentielles les animaux eux‑mêmes, en ait exclu les Gentils.
 
 
Aussi bien n'avons‑nous pas à chercher loin pour trouverons, preuve touchante du contraire. Joseph ne craint pas de dire à au frères, ose bédouine d'il y a trois mille ans, que sa descente en Hgypte, a été voulue par Dieu dans un dessein de miséricorde < pour sauver la vie à un peuple nombreux ~ (4). Ne tronvons‑nous pas ici, à côté de la conception de providence universelle, une idée plus noble et plus délicats encore, à savoir que les événements et même les épreuves auxquelles avaient été soumis les patriarches étaient, dans la main de Dieu, des moyens employés pour le bien des Gentils? Et cela était écrit après l'esclavage d'Egypte, au mo. ment où la loi mosaïque imposait aux juifs tant de pratiques des. tinées à en perpétuer le souvenir 1 Nous acensera‑t‑on d'exagération, s'il nous arrive de soutenir dam cet onviage que, dans l'esprit du judaïsme, la dispersion d'Israël et ses malheurs séculaire@ ont été voulus de Dieu pour le salut des national Nous oit avons loi, tout au débat de Phistoire israélite, un témoignage concluant dans ces paroles de Joseph si généreuses et si pleines des sentiments d1i~niversèIIe. charité.
 
 
 
 
(1) Là~, Hü~ 4% "t du gm, Y,1. I, p. 404.
 
 
(1) (1mèts, lx, 9.
 
 
(5) lwa., lx, 11, 15.
 
 
      IbId., M.
 
 
 
LE DMU PROVIDMOR                                                    130
 
 
Nous avons vu, dans maints passages des EQritnr«~ que Dieu est qualiflé de juge et que cette justice divine s'étend à tous les peuples. Cela suppose une loi générale obligatoire pour tout le genre humain et "a providence qui, uns distinction de ruéE4 l'applique en tout lieu et dans tous le@ temps. Nous allons suivre Vexemiee de cette juste providence dans leid8toire biblique et le développement ultérieur de la pensée israélite.
 
  
 
==References==
 
==References==

Latest revision as of 07:14, 13 June 2010

II

La providence universelle.

On a dit qu'Eschyle en montrant la main de Dieu dans les calamités qui frappent les nations a inauguré par cela même la philosophie de l'histoire. Cet honneur appartient à quelqu'un de plus ancien qu'Eschyle, s'il est vrai que dans la conception hébraïque la providence de Dieu embrasse l'univers entier. c'est ce que Max Müller a reconnu à sa manière lorsque, cherchant une définition générale qui pût s'appliquer à toutes les religions sémitiques, il a dit que celles-ci consistent dans le culte de Dieu dans l'histoire, à la différence des religions aryennes qui consistent dans le culte de Dieu dans la nature [1]

En ce qui concerne le paganisme, cette définition ne paraît guère exacte, car puisque les peuples aryens possédaient des dieux nationaux, on ne peut dire qu'ils ne connaissaient pas au moins une providence divine nationale. D'autre part, on ne saurait soutenir que les Sémites ont ignoré Dieu dans la nature. Ce qui est certain en tout cas c'est que le Dieu d'Israël apparait clairement avec le caractère de providence universelle même avant Moïse. Ne voyons-nous pas le patriarche Abraham s'interposer en faveur des pécheurs de la Pentapole? « Celui qui juge toute la terre n'exercera-t-il pas la justice? » [2]

« L'Eternel se présente pour plaider, dit Isaïe, il est debout pour juger les peuples » [3]. Le prophète déclare, au verset suivant, que l'Eternel va juger Israël mais n'est-ce pas parce que, comme il vient de le dire, Dieu est le juge de tous les peuples?

Rien ne démontre mieux cette notion de providence générale que l'idée de génies, de protecteurs invisibles que l'hébraïsme reconnaît à chaque nation et qui ne sont nullement des dieux [4] égaux à celui d'Israël comme on l'a prétendu, mais bien de simples ministres du Dieu unique et suprême et, ésotériquement, les attributs, les aspects particuliers que chaque peuple s'appropriait de l'Etre absolu soit qu'il les personnifiât en autant de divinités distinctes, ce qui était le fond de l'erreur polythéiste, soit qu'il subordonnât sa conception à la croyance à l'unité divine, ce qui constituait alors la vraie religion de la gentilité. L'expression hébraïque de Dieu des dieux , que nous aurons à étudier plus loin, doit être entendue dans ce sens et confirme ce que nous disons de la Providence universelle, car si l'Eternel est le Dieu des dieux, c'est apparemment qu'il leur commande et qu'il en veut être obéi.

Comment s'exerce pour les écrivains sacrés cette providence divine? « L'Eternel régna à jamais, il a dressé son trône pour le jugement. Il juge le monde avec justice, il juge les peuples avec droiture. L'Eternel est un refuge pour l'opprimé, un refuge au temps de la détresse ». Ceux qui connaissent ton nom se confient en toi, car tu n'abandonnes pas ceux qui te cherchent, ô Eternel ! » [5] « Les peuples le louent, ô Dieu! tous les peuples te louent. Les nations se réjouissent et sont dans l'allégresse, car tu juges les peuples avec droiture et tu conduis les nations sur la terre. Les peuples te louent, ô Dieu! tous les peuples te louent. La terre donne ses produits; Dieu, notre Dieu, nous bénit. Dieu nous bénit et toutes les extrémités de la terre le craignent » [6]

Le psaume XXXVI e nous fait de cette providence une description d'un souffle religieux et poétique admirable: « Eternel! ta bonté atteint jusqu'aux cieux, ta fidélité jusqu'aux nués... Eternel, tu soutiens les hommes et les animaux. Combien est précieuse ta bonté ô Dieu! à l'ombre de tes ailes les fils de l'homme cherchent un refuge. Ils se rassasient de l'abondance de ta maison, et tu les abreuves au torrent de tes délices. Car auprès de toi est la source de la vie » [7]. Et le psaume CXLV ajoute avec d'inimitables accents: « L'Eternel soutient tous ceux qui tombent et il redresse tous ceux qui sont courbés. Les yeux de tous espèrent en toi et tu leur donnes la nourriture en son temps; tu ouvres ta main et tu rassasies à souhait tout ce qui a vie. L'Eternel est juste dans toutes ses voies et miséricordieux dans toutes ses œuvres» [8] [9] « Déjà dans le Pentateuque, dit un auteur moderne, l'action de Dieu ne se borne pas au peuple élu. C'est lui qui envoie le déluge et disperse les nations après la construction de la tour de Babel; c'est lui qui détruit Sodome et Gomorrhe. Il sauve les Egyptiens dans la disette. Il détruit Ninive et envoie la victoire à Cyrus » [10]. Lorsque Dieu, après le déluge, établit son alliance c'est avec l'humanité entière en la personne de Noé et de sa famille: « Voici, j'établis mon alliance avec vous et avec votre postérité après vous » [11] Et ce n'est pas tout. On a souvent cité le mot gracieux de S. François d'Assise qui appelait les animaux ses « frères cadets ». Or, ce ne sont pas seulement les hommes, mais les animaux eux-mêmes qui, d'après la Bible, sont compris dans l'alliance divine: « C'est ici le signe de l'alliance que j'établis avec vous et tous les êtres vivants qui sont avec vous... Je me souviendrai de mon alliance entre moi et vous et tous les êtres vivants de toute chair » [12] Il est donc impossible que la religion hébraïque, qui embrassait dans les vues providentielles les animaux eux-mêmes, en ait exclu les Gentils.

Aussi bien n'avons-nous pas à chercher loin pour trouver une preuve touchante du contraire. Joseph ne craint pas de dire à ses frères, ces bédouins d'il y a trois mille ans, que sa descente en Egypte, a été voulue par Dieu dans un dessein de miséricorde « pour sauver la vie à un peuple nombreux » [13] Ne trouvons-nous pas ici, à côté de la conception de providence universelle, une idée plus noble et plus délicate encore, à savoir que les événements et même les épreuves auxquelles avaient été soumis les patriarches étaient, dans la main de Dieu, des moyens employés pour le bien des Gentils? Et cela était écrit après l'esclavage d'Egypte, au moment où la loi mosaïque imposait aux juifs tant de pratiques destinées à en perpétuer le souvenir! Nous accusera-t-on d'exagération, s'il nous arrive de soutenir dans cet ouvrage que, dans l'esprit du judaïsme, la dispersion d'Israël et ses malheurs séculaires ont été voulus de Dieu pour le salut des nations? Nous en avons ici, tout au début de l'histoire israélite, un témoignage concluant dans ces paroles de Joseph si généreuses et si pleines des sentiments d'universelle charité. [14] Nous avons vu, dans maints passages des Ecritures, que Dieu est qualifié de juge et que cette justice divine s'étend à tous les peuples. Cela suppose une loi générale obligatoire pour tout le genre humain et une providence qui, sans distinction de races, l'applique en tout lieu et dans tous les temps. Nous allons suivre l'exercice de cette juste providence dans l'histoire biblique et le développement ultérieur de la pensée israélite.


References

  1. Leçon d'introduction à la science des religions , p. 81.
  2. Genèse, XVIII, 25.
  3. Isaïe, III, 13.
  4. Page 136
  5. Psaumes, IX, vers. 8 et suiv.
  6. Ps., LXVII, 4 et suiv.
  7. Ps. XXXVI, 6 et suiv.
  8. Ps., CXLV, 14 et suiv.
  9. Page 137
  10. LAURENT, Histoire du droit des gens,, vol. I, p. 404.
  11. Genèse , IX, 9.
  12. Ibid., IX, 11, 15.
  13. Ibid., L, 20.
  14. Page 138