Israël et L'Humanité - Le Dominante et la conversion des païens

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IV.

Le noachisme et la conversion des païens.

§ 1.

Cette loi noachide ou universelle qui gouverne l'humanité tout entière, à l'exception d'Israël, et correspond à la phase actuelle de la nature, comme la loi mosaïque de son côté correspond aux degrés ultérieurs du développement humain et terrestre, doit être nécessairement plus rationnelle, plus appropriée au côté intelligible des choses. Ce caractère de rationalité est sa qualité dominante, nous dirons même constitutive. L'examen le plus superficiel suffit pour s'en convaincre.[1]« Le fait est, dit un auteur rabbinique, que les sept commandements noachides ne contiennent pas des préceptes suprarationnels (hukkim), mais seulement des préceptes intelligibles (michpatim et Mitsvoth). C'est pourquoi il est impossible d'acquérir par leur accomplissement la neschama (âme d'un degré supérieur), celle à laquelle les Docteurs font allusion quand, à propos de la parole biblique: Hommes vous êtes, ils ont dit: C'est vous (Israélites) qui méritez vraiment ce nom d'hommes ». Ce passage a surtout pour but d'exalter le mérite suréminent de la Thora d'Israël et Maïmonide donne de la loi noachide une définition plus exacte quand il écrit: « Quiconque accepte les sept commandements et les observe avec soin est considéré comme un Gentil pieux et il a part à la vie éternelle, mais c'est à la condition qu'il reçoive et exécute ces préceptes, parce que Dieu les a imposés dans sa Loi et qu'il nous a révélé par Moïse notre maître que ce sont là les ordonnances reçues à l'origine par les enfants de Noé; mais s'il pratique cela simplement parce que la raison le lui suggère, il ne devrait point être regardé comme un prosélyte de la porte ou citoyen, ni comme un homme pieux ou un sage parmi les Gentils »[2].

La loi de Noé n'a rien à envier pour la noblesse et la sainteté à la loi de Moïse elle-même. Elle fut non seulement la loi d'Adam, de Noé et de tous les patriarches avant Abraham, mais aussi celle d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, de tous leurs enfants et descendants et de Moïse lui-même avant la révélation du Sinaï. La religion d'Israël, antérieurement à l'avènement de Moïse, ne fut pas autre chose que le noachisme; ce nom qui continue à désigner la loi générale de l'humanité et qui s'applique à tous ceux qui la professent, est donc après celui de la Loi israélite, et peut-être à côté du nom d'Israël, ce qu'il y a de plus vénérable au monde.

§ 2.

Quelles étaient donc les formalités qui marquaient le passage du polythéisme au noachisme? Un texte cité plus haut nous a déjà indiqué que le Gentil qui se convertissait devait se présenter devant trois habérim (frères, compagnons), nom que l'on donnait en certaines occasions aux docteurs d'Israël. En leur présence il avait à déclarer son intention d'appartenir dorénavant à la religion noachide. C'est[3]ainsi que l'Israélite lui-même devait procéder, lorsqu'il prenait la résolution d'observer désormais dans sa vie privée les règles de pureté propres aux Pharisiens, s'il désirait être cru sur parole dans ses attestations relatives à ces mêmes règles; en ce cas la décision du haber fait autorité contre l'ignorant ( am aaretz) dont la parole n'a aucune valeur en pareille matière.

Il est assez probable, bien que les anciens Docteurs soient muets à cet égard, que le rite du baptême ou ablution accompagnait la conversion du païen au noachisme aussi bien que son affiliation au mosaïsme proprement dit. Ce rite en effet était pratiqué non seulement par le Gentil qui passait au Judaïsme [4], mais encore par l'esclave païen au service de l'Israélite [5]et par le Juif apostat rentrant dans la communion d'Israël [6]. Il marquait aussi le passage à un degré de sainteté supérieure, comme par exemple pour le grand prêtre le jour des Expiations et constituait une des conditions essentielles pour se purifier de toute espèce de souillure. Nous voyons qu'Elisée l'ordonne également au général syrien Naaman [7] et que ce dernier ne se méprend pas sur le caractère religieux du conseil. Il serait donc bien étonnant que ce rite n'ait pas été imposé au païen qui se convertissait à la loi noachide. Ce qu'il y a de certain, c'est que le christianisme en a compris ainsi la signification, puisqu'il en a rendu la pratique obligatoire pour le païen converti et plus tard, si ce n'est à la même époque, pour le Juif également. Si le baptême, comme nous le prouvent tous les documents évangéliques, fut prêché et imposé par Jean aux Juifs en signe de pénitence, cela ne fait que confirmer nos suppositions relativement à la conversion du païen au noachisme.

Sans doute le baptême tel qu'il fut pratiqué par la suite dans l'Eglise chrétienne comme rite d'initiation est une observance copiée sur les cérémonies juives, comme l'organisation du nouveau culte nous en fournit tant d'autres exemples. Latebila du païen se convertissant au mosaïsme a servi de modèle au baptême du païen entrant dans l'Eglise. Mais dans le judaïsme, il y avait, à côté du baptême, la circoncision, et comme de ces deux rites le christianisme n'a conservé que le premier, il serait difficile de douter que le choix de cette pratique ne soit dû à sa préexistence comme formalité[8] d'introduction à la loi noachide, puisque le christianisme s'est précisément efforcé de constituer celle-ci comme forme unique de religion, faisant ainsi aboutir le mouvement religieux à ce qui était en réalité son point de départ.

Quelle que fût d'ailleurs la manière dont le nouveau noachide était reçu au moment de sa conversion, ce qui nous importe de connaître, c'est la loi dont il se chargeait. Nous avons à maintes reprises parlé des sept préceptes qui la constituent. Nous verrons bientôt ce qu'il faut penser de ce nombre que certains Docteurs ont considérablement augmenté et quelle signification il convient de donner à chacun de ces commandements. Mais avant d'aborder cette étude détaillée, examinons d'abord dans son ensemble le contenu de cette loi.


References

  1. Page 619
  2. Melachim, VIII.
  3. Page 620
  4. Caro, Joré Dea, 268, 2.
  5. Ibid, 267, 3.
  6. Isseves, Juré Dea, 268, 12.
  7. II Rois, V, 10, 14, 15.
  8. Page 621