Israël et L'Humanité - Lois morales du noachisme

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VII.

Lois morales du Noachisme.

Il nous reste à parler de deux classes de rfvègles pratiques qui jusqu'ici sont restées en dehors des précédentes énumérations. il s'agit des lois morales et des lois politiques qui ne sauraient avoir été abandonnées à l'arbitraire, au moins en ce qui concerne leurs principes essentiels. Il est impossible qu'aucune pensée dirigeante ne gouverne ces questions qui intéressent à un si haut point la destinée de l'homme ici-bas.

Pour ce qui est des lois morales, il est certain qu'elles embrassent toute l'humanité. Et en effet, c'est de l'homme en général que l'Ecriture nous parle chaque fois qu'il est question de la conduite et cela non seulement dans les livres prophétiques ou chez les hagiographes comme l'auteur des Proverbes, mais même dans le Pentateuque. Là, également nous voyons que la vie morale est proclamée indispensable à la dignité de tous les hommes indistinctement [1]comme les Docteurs l'ont fait remarquer justement à propos des immoralités dans lesquelles étaient tombés les païens [2] « Ce sont là, dit Moïse, toutes les abominations qu'ont commises les hommes du pays, qui y ont été avant vous [3] » et en employant ce mot d'hommes dont la signification est universelle, ne semble-t-il pas que le divin législateur veuille rappeler que les lois morales s'appliquent aux Gentils aussi bien qu'aux Juifs? Ce passage du Lévitique n'est qu'un exemple, entre tant d'autres, où l'on voit Dieu approuver ou condamner, récompenser ou punir les Gentils, en un mot intervenir soit comme législateur, soit comme juge souverain de leur conduite et cela, d'après une loi supérieure à laquelle ils sont soumis comme les Israélites et qui est la même pour tous. Cette règle de morale uniforme se révèle non seulement dans la situation des païens vis-à-vis de Dieu, mais aussi dans leurs rapports avec Israël et d'une manière générale dans les relations de tous les hommes entre eux. C'est elle qui prescrit même envers l'idolâtre, ennemi religieux et presque toujours politique d'Israël, les devoirs de justice et de charité à observer, alors même que l'on ne voudrait leur donner pour base que l'intérêt de la paix, selon le mot des Rabbins ou, d'après la qualification de la philosophie moderne, un principe de morale simplement utilitaire. Peut être faut-il voir dans cette unité de la loi morale qui gouverne l'humanité la raison pour laquelle, d'un bout à l'autre du code mosaïque, c'est l'élément national, politique, qui prévaut plutôt que l'élément moral. Celui-ci est supposé universellement connu, soit par un instinct naturel du genre humain, soit par une tradition commune à tous les peuples, de même que les croyances fondamentales sont généralement sous-entendues plutôt que formellement exprimées.

Quant aux lois sociales, qui sont loin d'être indifférentes, elles doivent également faire partie de la loi noachide. Nous ne prétendons certes pas qu'il faille s'attendre à y trouver un système complet de gouvernement, un code à proprement parler politique. Mais que des vérités générales, des germes de progrès futur, des règles essentielles de droit public s'y rencontrent, cela n'est pas douteux. La politique envisagée à un point de vue élevé se confond avec la morale, or si celle-ci est comprise dans la loi noachide ou [4]universelle, la politique qui en dérive en grande partie ne peut pas en être non plus complètement exclue. Sa nature même, toute rationnelle et par conséquent éminemment humaine, indique suffisamment qu'elle doit avoir sa place dans une législation commune à tous les hommes.

On sait qu'un plan de politique selon la Sainte Ecriture a été non seulement conçu, mais écrit, et quoique nous soyons loin de nous porter garant de tout ce que Bossuet peut avoir présenté comme une interprétation de la parole divine, il faut bien, pour qu'il se soit essayé à un pareil travail, qu'il en ait découvert la matière dans la Bible. Certes, ce serait une œuvre grande et utile que celle qui consisterait à reprendre, au point de vue critique et israélite, l'étude de l'aigle de Meaux. Dans le conflit moderne entre l'Eglise et l'Etat ou, si l'on veut, entre la religion d'une part et la civilisation de l'autre, un essai de cette nature aurait une importance considérable. Mais pour la démonstration que nous poursuivons en ce moment, il suffira d'établir que le judaïsme possède, non seulement un culte et une morale qui embrassent toute l'humanité, mais encore une politique universelle. Ce sera le sujet du chapitre suivant.[5]


References

  1. Page 629
  2. Schabbath , 33 <super> a </super>
  3. Lévitique, XVIII, 27
  4. Page 630
  5. Page 631