Israël et L'Humanité - Mariage et divorce

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VII.

Les lois matrimoniales.

§ 1.

MARIAGE ET DIVORCE.

C'est Dieu lui-même qui, d'après les Rabbins, [1] a institué le mariage lors de la création de la femme et l'inviolabilité de cette union est sanctionné, selon eux, en ce qui concerne les Noachides, par ce verset de la Genèse: « C'est pourquoi l'homme quittera son père et sa mère, et s'attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair [2]». « Il est écrit, disent les Docteurs: il s'attachera à sa femme , et rien pas à la femme de son prochain ».

Qu'est ce qui constitue le mariage dans la religion universelle dite noachide? C'est uniquement le fait de s'appartenir exclusivement (ihoud), mais il est naturel de supposer que, puisque l'institution des magistrats est un des préceptes imposés aux enfants de Noé, cette destination exclusive des époux doit être constatée par l'autorité publique, ne fût-ce que pour rendre possibles la poursuite de l'adultère et la dévolution de l'héritage. Un texte de Maïmonide tiré du Talmud montre bien que tel est le caractère du mariage: « Si un Noachide, après avoir destiné à son esclave une femme esclave, se permet ensuite d'avoir commerce avec celle-ci, il sera puni de mort [3] ». L'exemple choisi ne nous offre-t-il pas une preuve d'équité vraiment étonnante pour cette époque là? Maître et esclave sont païens tous les deux et ce dernier toutefois jouit, selon le judaïsme, de ses droits inviolables de mari à l'égal de son maître, qui se trouve menacé, comme un étranger quelconque, du dernier supplice, s'il ose outrager les droits de son semblable; tel est en effet le terme éloquent que les Rabbins emploient dans cette circonstance pour désigner l'esclave ( habero ).

Nous disons que l'indissolubilité du mariage a paru découler des paroles mosaïques; de fait, c'est une simple déduction. Que l'homme ne doive pas séparer ce que Dieu a uni, cela ne fait pas [4] de doute, mais la question est justement de savoir ce que Dieu a uni ou, pour employer l'expression rabbinique, ce que l'homme peut vraiment considérer comme sa moitié [5]. S'il la rencontrait toujours immanquablement dans l'union conjugale, on devrait dire que dissoudre celle-ci serait aller contre la volonté divine, mais comme il n'en est pas nécessairement ainsi et que les couples ne sont pas chaque fois bien assortis, on peut soutenir que c'est au contraire pour unir ce que Dieu a uni qu'il est parfois indispensable de recourir à cette séparation; ainsi l'argument se retourne contre la thèse.

Quant à l'union des époux elle-même, nul plus que les Rabbins et en particulier les Kabbalistes, ne l'a comprise d'une manière plus parfaite, puisqu'ils l'ont vue non seulement dans le corps, mais dans l'âme même, constituée à leur dire de deux moitiés qui participent à la nature des deux sexes, si bien qu'ils ont été jusqu'à déclarer dans le Talmud que l'homme sans femme n'est pas un homme. Si l'on veut bien se rappeler en outre ce que les enfants sont aux yeux du judaïsme biblique et traditionnel, on n'hésitera pas à faire honneur à celui-ci d'une formule que nous devrions, à ce que prétend Michelet, aux lois de Manou: « La vraie formule du mariage, dit-il, que nulle société ne dépassera dans l'avenir est trouvée et posée: l'homme n'est homme qu'autant qu'il est triple, c'est à dire homme, femme et enfant ». La théosophie a consacré cette doctrine en introduisant « la sainte famille » dans sa symbiologie et il est assez probable que nous avons lu le type primitif de la Trinité: l'homme (père), l'enfant (logos) et la mère (Saint-Esprit) [6]

mais quelque haute idée que les Docteurs se forment du mariage, il n'en faut nullement conclure, nous le répétons, que toute séparation des époux est impossible. Seulement, de l'avis unanime des commentateurs, les Noachides ne sont point soumis aux formalités du divorce exigées par la loi d'Israël. De même que le mariage se contracte par le simple consentement des époux, de même aussi il peut se dissoudre par leur assentiment mutuel. Telle [7]est la doctrine que Maïmonide a fait prévaloir. Nous trouvons dans le Talmud palestinien un texte qui, pour être moins explicite, n'est pas moins instructif dans sa concision. on y lit en effet: « Le divorce existe-t-il pour les Noachides? R. Jehouda répond; on bien il n'existe pas du tout ou bien la faculté de divorcer est concédée à la femme aussi bien qu'à l'homme [8]». Cette dernière disposition, sanctionnée comme les précédentes par Maïmonide, mérite toute notre attention. Elle prouve que la pensée des Docteurs pharisiens s'était déjà élevée jusqu'à la conception d'une parfaite égalité entre le mari et la femme dans la question du divorce. Si donc ils n'ont pas apporté la même tendance dans les dispositions de la loi israélite, ce n'est ni faute de hardiesse, puisqu'ils en ont donné tant de preuves, ni faute de progrès intellectuel, puisqu'ils ont assez montré dans leur étude de la loi noachide qu'ils en étaient capables; c'est uniquement parce qu'ils ont dû respecter une doctrine reçue de leurs devanciers.


References

  1. Sanhédrin, 57 <super> b</super>.
  2. Genèse II, 24.
  3. Malachim IX, 8; Sanhédrin, 57 <super> b</super>
  4. Page 694
  5. בת זוג
  6. Cette identification de la mère avec le Saint-Esprit ne doit pas trop surprendre. On sait que certaines sectes chrétiennes ont placé Marie dans la Trinité au lieu du St Esprit et que pour les gnostiques le St Esprit est un principe féminin. Jésus, dans les Evangiles apocryphes parle de sa mère le St Esprit. Dans la Kabbale, l' éon Malkhout réunit ce double caractère.
  7. Page 695
  8. Kiddouschin, ch, 1.