Israël et L'Humanité - Noblesse du corps humain

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III.

Noblesse du corps humain.

Lorsque l'hébraïsme affirme que l'homme est l'image et le temple de Dieu sur la terre, il s'agit, dans la pensée juive, du corps humain aussi bien que de l'esprit. Ce n'est pas d'aujourd'hui que la remarque a été faite: parmi tous les peuples et toutes les religions de l'antiquité, l'hébraïsme et les Hébreux ont été les seuls qui aient réhabilité la matière. On a même été jusqu'à prétendre qu'ils seraient allés si loin dans cette voie qu'ils auraient totalement méconnu les droits de l'esprit et glorifié la matière toute seule et que, n'accordant d'importance qu'aux actes extérieurs uniquement, ils auraient nié en pratique l'existence d'une substance spirituelle dans l'homme. Le jugement si exclusif et, disons-le de suite, si erroné, nous dispenserait donc à la rigueur de démontrer en quelle estime le judaïsme tient le corps humain et tout ce qui le concerne. S'il est faux dans ses conclusions, il n'en prouve pas moins que, de l'aveu de tous, le corps de l'homme a pour l'hébraïsme une éminente dignité. Un examen superficiel des pages bibliques, talmudiques, midrashiques ou théosophiques suffirait pour s'en convaincre.

Les titres d'image et de temple de Dieu ont été prodigués, il est impossible de le nier, au corps comme à l'esprit. Le corps est l'objet des soins les plus minutieux de la part de la législation rituelle du judaïsme; aucun acte extérieur n'est jugé indigne des préoccupations religieuses. Cette sorte de tutelle constante à laquelle le corps se trouve soumis, est d'ailleurs entièrement différente du régime de pénitence, de la sujétion systématique dans lesquels d'autres religions s'efforcent de le maintenir. L'idée dont [1]ces autres cultes s'inspirent, loin de pouvoir se confondre avec celle du judaïsme, lui est même radicalement antipathique. Il y a entre les deux toute la distance qui sépare l'estime du mépris, l'amour de la haine, et le désir de transformer peu à peu le corps et ses opérations en instruments dociles de la spiritualité, de la volonté bien arrêtée de le détruire, voire même de l'anéantir, en un mot toute la différence qui existe entre la conception du corps glorifié et celle du nirvana . Les biens matériels, la santé, la richesse, le bonheur, la longévité, sont envisagée sous le même aspect; l'idée que l'on s'en forme dépend de la valeur que l'on accorde au corps lui-même . De là l'erreur de ceux qui voient dans le prix que le judaïsme attache au corps humain et aux biens matériels une preuve que la notion de spiritualité lui fait défaut; il en est au contraire le témoignage le plus irrécusable, puisque la forme et la santé du corps, la vie et ses biens, sont indissolublement associés avec la religion, la sainteté, fumeur et la crainte de Dieu. Cette bénédiction temporelle est liée à l'obéissance aux commandements de Dieu; on l'obtient comme une récompense, on la perd en guise de châtiment. C'est dans un but toujours moral et élevé qu'on en use; elle s'accompagne constamment de grâces et de douceurs spirituelles. Ce n'est pas la spiritualité qui manque, c'est la matière qui en est saturée; l'esprit ne paraît absent que parce qu'il ne fait qu'un avec le corps.

Il y a dans ce phénomène rituélique et législatif quelque chose d'analogue au fait que l'auteur du Kozari signale dans l'histoire israélite. Il dit avec raison qu'un peuple, témoin dans toutes les phases de son existence publique et privée de l'intervention directe et presque visible de la Divinité, n'avait pas besoin qu'on lui parlât de L'Esprit, de ses droits et de son empire, puisque sa vie tout entière en plaidait assez éloquemment la cause. Il en est à peu près de même en ce qui concerne les préceptes pratiques du Judaïsme si nombreux en comparaison du petit nombre de professions de foi spiritualiste que l'on peut trouver dans la Bible. C'est que la vie matérielle elle-même était disciplinée par des règles supérieures. On aspirait à la façonner de telle manière quelle reproduisît en elle-même la vie spirituelle et, avec une logique qu'on ne saurait assez admirer, de même que la matière et l'esprit n'étaient point conçus séparément, de même aussi dans les règles et les lois concernant l'homme, cet être à la fois physique et spirituel, on ne séparait pas l'acte matériel et l'acte de foi, le mouvement et la [2]pensée, l'histoire et la conscience, la terre et le ciel, ce monde et le Royaume de Dieu. Tout, dans la pratique comme dans le dogme, rattachait l'un à l'autre et ce qui intéressait le domaine temporel rappelait et supposait aussi la vie de l'esprit.


References

  1. Page 300
  2. Page 301