Israël et L'Humanité - De l'obligation du martyrs pour les Gentils

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§ 2.

DE L'OBLIGATION DU MARTYRE POUR LES GENTILS.

Le Talmud s'est tout naturellement demandé si la profession du monothéisme entraîne pour les non juifs l'obligation de subir le martyre plutôt que d'enfreindre leurs devoirs religieux.[1]Pour l'israélite de naissance, la question ne se pose même pas et l'histoire est là pour attester avec quel incomparable héroïsme Israël a toujours compris ce devoir. Mais les Docteurs ont élevé un doute à propos du noachide et leurs controverses à ce sujet prouvent à elles seules le soin qu'ils mettaient à étudier tout ce qui concerne la religion universelle et la généreuse tolérance qu'ils professaient à l'égard des gentils attirés par les doctrines du judaïsme. Ces recherches justifient en outre les Pharisiens de ce reproche que leur fait quelque part l'Evangile de vouloir imposer aux païens convertis un joug plus pesant que celui dont ils se chargeaient eux-mêmes [2]

Quoi qu'il en soit, voici le passage talmudique dont il s'agit: « On demanda à R. Ammé: Le noachide est-il, oui ou non, obligé de sanctifier le nom de Dieu (par le martyre)? Abayé répondit: Que dit la Baraïta ? Sept commandements ont été prescrits aux enfants de Noé. Or il y en aurait huit, si la sanctification du nom de Dieu devait être considérée pour eux comme un précepte. Raba répliqua: Sous les sept commandements, il faut comprendre également toutes les particularités qui en dépendent. Qu'a-t-on conclu de tout cela? Rab Adda, fils d'Ahaba, dit au nom de l'école de Rab: Il est écrit [3]: « Voici toutefois une chose que je prie l'Eternel de pardonner à ton serviteur. Quand mon maître pénètre dans le temple de Rimmon pour l'adorer et qu'il s'appuie sur mon bras, je me prosterne aussi dans le temple de Rimmon: que l'Eternel daigne pardonner à ton serviteur, lorsque je me prosternerai dans le temple de Rimmon! Elisée lui répondit: Va en paix ». Par conséquent, si le noachide (comme Naaman) était tenu de sanctifier le nom de Dieu, Elisée attrait dû lui enseigner la distinction entre l'acte public d'adoration qui est défendu et l'adoration secrète qui est permise quand la vie est en danger [4]».

L'indulgence dont les Rabbins font preuve, d'après ce texte précieux, à l'égard du noachide relativement au devoir de la sanctification du nom de Dieu, autrement dit du martyre, ne se rattache-t-elle pas à cette liberté que la tradition laisse au non-juif d'associer dans son adoration les dieux inférieurs subordonnés au [5]Dieu suprême ?[6]Il est au moins permis de le supposer tellement le rapport paraît évident. En tout cas, ce qui est intéressant, c'est la doctrine qui a été tirée de ce passage du Talmud. Sur ce point comme sur tant d'autres, les avis se sont partagés. Selon Rachi, le problème n'a pas été résolu. D'après les Tosafotau contraire, la question a été tranchée dans le sens de la dispense accordée au gentil et c'est aussi ce qui résulte du système de Raschi lui-même, car puisqu'il prétend que le doute subsiste, il est clair que cette incertitude ne peut donner lieu à aucune obligation de conscience. Maïmonide, R. Jona et R. Nissim se rangeait à l'avis des Tosafot; Toutefois ce dernier prétend que Raschi a vu dans le Talmud l'obligation du martyre pour les Gentils comme pour les Israélites et Nachmanide, en traitent cette même question, déclare expressément que, lorsqu'il s'agit d'un acte d'adoration publique, les noachides sont tenus, eux aussi, de sanctifier le nom de Dieu [7]


References

  1. Page 672
  2. Matthieu, XXXII, 4.
  3. Rois, V. 18,19.
  4. Sanhédrin
  5. Page 673
  6. Pour éviter toute confusion dans l'esprit du lecteur, nous croyons devoir remarquer que lorsque l'auteur parle d'adoration de dieux inférieurs, il prend le mot adoration dans le sens de vénération, hommage qu'il a souvent dans la Bible. Il résulte de son exposition de la doctrine hébraïque relativement au culte noachide qu'elle présente une certaine analogie avec celle des théologiens romains. On sait en effet que ceux-ci distinguent entre le culte de latrie qui n'est dû qu'à Dieu seul et celui de dulie qui est rendu aux anges et aux saints. Ce dernier culte, permis aux gentils dans la mesure où il n'altère pas la profession du pur monothéisme, est rigoureusement interdit à Israël. De fait Moïse lui-même n'a été l'objet d'aucun culte chez les juifs et le lieu de sa sépulture a même été tenu secret, afin que les foules ne fussent point tentées d'associer en quelque manière le plus grand des prophètes à l'adoration du vrai Dieu (Note des Editeurs).
  7. Sanhédrin 74; Nachmanide, Sepher Milhamot ascem; Maïmonide, Melachim X, 2.