Israël et L'Humanité - La femme païenne

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§ 3.

LA FEMME PAÏENNE.

Il convient de parler ici d'une loi qui nous permet d'admirer non moins que les précédentes les sentiments de délicatesse et de charité de la Thora d'Israël à l'égard de l'étranger. Nous voulons parler de la loi sur la prisonnière de guerre applicable également à la femme cananéenne quand elle se trouvait au milieu d'une autre peuplade idolâtre. Il était permis à l'israélite de la prendre pour femme et elle était reconnue comme épouse légitime (ischa).

Ce qui est non moins remarquable, c'est que bien que le législateur, disent les Rabbins, n'approuve pas ce mariage, dont il prévoit les funestes conséquences signalées par les dispositions légales qui suivent sur la femme détestée et sur le fils rebelle, il [1]respecte toutefois l'affection de l'Israélite qu'il croit prudent de ménager sachant qu'elle pourrait être assez forte pour briser tous les obstacles. Aussi se borne-t-il à réglementer cette union avec la femme étrangère et avec quelle bienveillance pour celle-ci! Il prescrit à l'Israélite de l'introduire dans sa maison où elle doit quitter ses vêtements de captive. Il insiste sur l'obligation pour le Juif de la faire habiter dans sa propre demeure et il prescrit, par une attention vraiment touchante, qu'avant de consommer le mariage, il lui soit laissé un mois entier de liberté pour pleurer son père et sa mère [2]. Ce n'est qu'après tous ces préliminaires que l'Israélite peut faire d'elle son épouse légitime.

Mais la sollicitude de la Loi pour la femme païenne ne s'arrête pas là. Elle prévoit le cas de dégoût et d'abandon de la part du mari et elle interdit absolument de la vendre comme esclave, toute prisonnière qu'elle soit, « car, dit Moïse, tu l'auras humiliée >. Ce ne sont là que les dispositions de l'Ecriture. Quant à la Tradition, malgré un double courant chez les Docteurs, elle ne fait en somme que renchérir sur les bienveillantes intentions de la Bible. Qu'il suffise de dire qu'on ne peut s'emparer que d'une seule femme étrangère, qu'il est interdit d'en prendre une autre, même pour le compte d'un proche parent, et d'exercer envers aucune femme une violence quelconque sur le champ de bataille. Les parents que la Loi autorise la prisonniers à pleurer librement pendant un mois deviennent pour les Rabbins les dieux de la captive et ses larmes ne sont que le culte qu'elle peut sans contrainte leur rendre durant cette période. Il faut remarquer d'ailleurs que la Tradition aussi bien que l'Ecriture est muette sur la question de la conversion religieuse de la femme païenne. En admettant que la rupture avec le polythéisme lui fût imposée, on sait, après ce que nous avons dit de l'esclave, quelles limites la Loi traçait à cette conversion et de quelles garanties elle l'entourait.

L'éloge que fait de la législation mosaïque un auteur certainement au dessus de tout soupçon de partialité ou d'exagération nous paraît donc parfaitement justifié: « Cette loi, écrit M. Laurent, annonce dans le législateur une délicatesse de sentiments que l'on cherche en vain dans les plus grands philosophes de l'antiquité païenne ». Et il conclut: « Moïse a plus de respect pour la femme esclave que Platon n'en a pour les femmes libres [3]».[4]


References

  1. Page 605
  2. Deutéronome, XXI, 11-14, voir aussi Siphré et Raschi sur ce passage.
  3. Histoire du droit des gens, I, 373.
  4. Page 606