Israël et L'Humanité - Le sabbat dans l'histoire

From Hareidi English
Jump to: navigation, search

§ 3.

LE SABBAT DANS L'HISTOIRE.

La facilité avec laquelle les Romains, sans vouloir toutefois renoncer à leurs rites païens, adoptèrent le sabbat juif, est un fait incontestable. La législation rabbinique concernant les devoirs des prosélytes de la porte, c'est-à-dire des Noachides, est certainement pour beaucoup dans cette observation du repos sabbatique. Il faut remarquer en outre que, seul entre tous les jours de fête juive, le sabbat a une signification et une portée universelle. Il ne s'agit pas en effet d'une commémoration de la sortie d'Egypte, d'une solennité agricole, d'un premier de l'an comme la fête du Souvenir ou d'un jeûne en expiation des transgressions de la Loi comme le Grand Pardon, mais bien d'une profession de foi à la création de monde ou, pour mieux dire, à l'origine divine des choses. On comprend ainsi qu'en raison du sens général qu'il présente, le sabbat ait été plus ou moins rigoureusement imposé au simple Noachide. La nécessité, la moralité du repos hebdomadaire devaient d'ailleurs tout naturellement en faire étendre la pratique à tous les hommes. C'est sans doute en raison de ce caractère moral que l'observation du sabbat porte seule, parmi tous les préceptes de nature purement religieuse, une sanction pénale corporelle; car, ainsi qu'on l'a fait remarquer justement, la transgression de ce repos nécessaire doit être considérée comme un attentat contre la vie humaine.[1] Une autre cause de la popularité du sabbat dans l'empire romain, c'est que cette observance n'était vraisemblablement pas sans précédent dans l'antiquité païenne. Si la division hebdomadaire était primitivement inconnue à Rome, il paraît maintenant établi, au dire des critiques, qu'elle existait chez les Babyloniens, ce qui expliquerait l'origine probablement chaldéenne du mot sabbat. Dans des vers d'Hésiode et de Linus nous lisons: « Le septième jour est un jour sacré; en lui toutes choses, furent achevées. Le septième jour est beau, il est l'origine de toutes choses, il est le premier et le dernier, il est parfait et accompli ». Il est vrai que ces vers sont considérés comme une interpolation des Juifs hellénisants, mais même s'ils doivent être tenus pour apocryphes, ils témoignent du moins que les auteurs ont compté que la disposition d'esprit du monde païen les ferait bien accueillir.

Quelques critiques modernes ont bien prétendu que les versets du début du deuxième chapitre de la Genèse sont loin de prouver que l'institution du sabbat soit antérieure à Moïse, car on n'en trouve aucune autre mention dans toute l'histoire postérieure jusqu'à l'avènement du grand législateur. Mais des faits et des locutions en grand nombre attestent que lorsque le sabbat fait son apparition au temps de Moïse, ce n'est point à la façon d'une institution entièrement nouvelle. La Bible aurait-elle dit:« Souviens-toi du jour du sabbat pour le sanctifier », s'il n'avait pas été connu et même observé auparavant ? De même les Hébreux ne se seraient pas spontanément abstenus d'aller ramasser la manne ce jour là en prenant chacun la veille une double ration, s'ils n'avaient précédemment appris à distinguer cette journée entre toutes les autres. Aussi les Docteurs enseignent-ils que c'est à Mara que le commandement du sabbat ainsi que les lois judiciaires furent communiqués à Israël d'une manière définitive, mais que les Hébreux avaient déjà une certaine connaissance du premier pendant leur séjour en Egypte.

Les exégètes qui ne voient dans l'observance sabbatique qu'un précepte exclusivement israélite, auquel par conséquent les prosélytes de justice seraient seuls soumis, font valoir que le motif invoqué par l'Exode pour la célébration du septième jour est le souvenir de la délivrance d'Egypte. Le sabbat n'aurait donc pas le caractère de précepte universel et ne concernerait en rien le Noachide. Mais c'est se tromper grandement que de croire que l'Ecriture motive ainsi le commandement [2] du sabbat. La mention qu'elle fait, en cet endroit, de la sortie d'Egypte est un appel à l'obéissance israélite et non une raison intrinsèque de l'institution. Cela est si vrai qu'elle se trouve réitérée à propos de beaucoup d'autres préceptes qui n'ont aucun rapport avec le fait en question et que parfois aussi elle est rappelée pour réclamer la fidélité à toute la Loi en général.

L'observation du sabbat par les Gentils, dont nous découvrons des traces indéniables dans l'histoire, n'est donc nullement en contradiction avec l'Ecriture, pour ceux du moins qui, sans embrasser tout le mosaïsme, se convertissaient au Dieu d'Israël; elle n'eût pu faire d'ailleurs autrement l'objet d'aucune législation spéciale de la part des Rabbins.


References

  1. Page 485
  2. Page 486