Israël et L'Humanité - Rôle des philosophes païens

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RÔLE DES PHILOSOPHES PAÏENS.

Nous trouvons dans un livre de l'ancienne littérature rabbinique que nous avons déjà cité les paroles suivantes: « Sept prophètes ont surgi parmi les Gentils et ce sont eux qui porteront témoignage pour leur condamnation ». Et ailleurs: «  Je prends à témoin le ciel et la terre que le Saint Esprit reposera sur chacun selon ses bonnes œuvres, qu'il soit homme ou femme, libre ou esclave, juif ou gentil [1] »

Cette croyance à la prédication de la loi divine aussi bien chez les païens que chez les Israélites a passé comme tant d'autres choses du judaïsme dans le christianisme. On sait ce que Paul [2]disait aux Gentils à ce sujet et quel rôle providentiel il attribuait au philosophes païens. Après lui Clément d'Alexandrie nous dit dans ses Stromates  : « De même que Dieu a voulu procurer le salut des Juifs en leur donnant des Prophètes, de même il en a choisi parmi les plus distingués d'entre les Grecs et les a séparés du vulgaire, dans la mesure où ils étaient capables de comprendre la bienfaisance divine. Ainsi Grecs et Juifs ont été instruits par des Testaments divers d'un seul et même Seigneur ». Ce qu'il y a de curieux dans ce rapprochement des deux traditions juive et chrétienne, c'est que les Rabbins ont également donné la qualification de philosophes aux prophètes païens. Ils mettent par exemple sur le même rang Eunomius de Gadara, philosophe stoïcien du II <super> e </super> siècle et Balaam qu'ils nomment nabi et disent revêtu d'une mission auprès des Gentils. «  Il n'a pas surgi chez les peuples païens de philosophes comparables à Eunomius de Gadara et au méchant Balaam. »

La cause de cette confusion chez les Docteurs, c'est évidemment l'unité de prédication dans la Gentilité, preuve et conséquence de l'unité de Loi qu'il reconnaissent. Le caractère en quelque sorte religieux que se donnaient eux-mêmes les stoïciens, en prenant non seulement le langage, mais les habitudes et les dehors de véritables apôtres, comme le démontre l'histoire de la philosophie, n'a pas peu contribué à faire attribuer aux philosophes un rôle analogue à celui des prophètes chez les Hébreux, une mission providentielle. C'est ainsi que s'expliquent maints passages des écrits rabbiniques qui parlent des philosophes païens dans les mêmes termes que des voyants d'Israël.

Nous retrouvons de semblables idées dans l'hellénisme et ceci nous ramène au témoignage de Philon par lequel nous avons commencé ce chapitre. « Philon, nous dit un auteur catholique, est convaincu que les lumières de la raison propagées par la philosophie suffisent pour amener tous les hommes au monothéisme, sans qu'il soit nécessaire qu'ils passent par le judaïsme ou, pour mieux dire, le monothéisme étant le véritable judaïsme, tous les hommes seront de véritables juifs dès qu'ils seront arrivés à la connaissance du vrai Dieu [3] ». Nous n'aurons pas de peine à prouver bientôt que cette doctrine de Philon est foncièrement juive et que, loin d'être uniquement inspirée, comme l'a prétendu à tort la critique, par [4]les besoins de la controverse avec les Gentils, elle occupe au contraire une place importante dans la législation israélite elle-même . C'est ce qu'atteste cette formelle déclaration des Rabbins que nous avons déjà citée: «  Quiconque rejette le polythéisme mérite d'être appelé juif . [5]»

Nous ne saurions mieux terminer ce que nous venons de dire sur le rapprochement entre les prophètes et les philosophes comme preuve du caractère universel de la Loi divine, qu'en rapportant ces paroles de M. Rémusat : « On veut mettre une certaine opposition entre la science et la foi. Je croirais volontiers que la première foi a été l'œuvre de la première science. C'est la réflexion de quelqu'un qui aura éclairé l'inertie intellectuelle des masses. Les Révélateurs ont été les philosophes du temps [6]» [7]


References

  1. Tanna debè Eliahu.
  2. Page 451
  3. Aug. Nicolas, Philosophe du Christianisme, I, p. 138
  4. Page 452
  5. R. Nissin in Aboda Zara 352 <super> a </super>
  6. Revue des Deux Mondes, Sept. 1865.
  7. Page 453